dimanche 31 janvier 2010

Je suis un film lent et contemplatif. Je suis une scène au ralenti qui ne finit jamais.

En fait, je ne suis plus. Je ne suis rien. Si je ferme les yeux, je perds toute proprioception. Je ne sais alors ni où je commence ni où je m'achève...

Je suis un amoncellement de neurones hyper stimulés. Je n'ai plus d'enveloppe terrestre.

Je ne suis qu'une grosse molécule qui flotte.

Si je me risque à vérifier ma vérité corporelle, c'est pour me rendre compte que la salinité qui m'englobe me donne la délicieuse sensation d'être un déversement onctueux.

Ça ne peux plus être moi. De toute façon, comment vérifier alors que je ne ressens plus rien de ce qui me caractérise organiquement?

C'est ainsi que je me rend compte que mes pieds n'existent plus. Je valide néanmoins ma réalité terrestre via cette lueur bleue omniprésente. C'est le seul stimulus visuel qui me rattache encore à ma conscience d'être une mortelle.

Ça et le bourdonnement de mes pulsations cardiaques dans mes tempes. C'est la seule musique pour me rappeler que je suis chairs et viscères.

Je suis devenue inertie. Mes mains, au prix d'un effort surhumain, tentent d'atteindre le fond du bassin mais une incroyable force qui m'est étrangère les ramènent invariablement à la surface.

Je découvre qu'il est vain de lutter contre l'absence TOTALE de gravité.

Puisqu'il en est ainsi, je décide alors de devenir mon propre jouet. Mon doigt, ultime outil de mon divertissement, me propulse d'un bout à l'autre de mon cocon. Ce flux-reflux forme une vague éternelle qui me caresse délicatement la nuque. Mes cheveux déploient une lente traînée dans les flots qui m'enveloppent. Leurs reflets donnent un spectacle psychédélique dans la voûte de mon caisson.

À un certain moment, ça devient trop, je ne sais plus trop quoi ressentir. Peut-être que notre monde lourd et accablant, où je dois lutter pour mon confort, me manque?

Mais des heures plus tard, mon sevrage devient douloureux. Je suis hantée par mon cocon perdu. Je deviens William Hurt dans Altered States.

Mais sans le cauchemar.

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